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Le Petit Peuple des Grandes Herbes

                                « Le Petit Peuple des Grandes Herbes »

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 Est un modeste hommage au fascinant monde des insectes. papillons, scarabées, araignées, libellules, hyménoptères ou orthoptères, tous sont des indices précieux de l’état de santé de nos campagnes.

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On ne le dira jamais assez : la destruction ou la modification à grande échelle de leurs habitats concourent à la raréfaction de nombreuses espèces en rompant la chaîne du vivant.

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Mieux les connaître, pour mieux les protéger, tel est la devise implicite des pages que nous leur consacrerons au fil de nos recherches. 

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                  Chapitre premier

Le Grillon Pellucide alias le Grillon d'Italie

 Pour mieux déceler leurs secrets, il est des livres et des musiques, a fortiori leurs auteurs et compositeurs vers lesquels on revient, il va de soi, sans se lasser. Tel un bourdon impudent, assoiffé de délices, et buvant au calice un ultime atome de nectar.

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Sources limpides, ils abreuvent les sillons de l’esprit jusqu’à infuser la matière d’éclatants faits d’art et de culture.

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 Leurs admirables levers de soleils, nous font nous dresser et avancer plus vaillamment qu’aucun hymne guerrier ; leurs couchers apaisants nous reposer l’âme tranquille dans un sentiment réparateur du devoir accompli.

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 Ils sont les phares et les fanaux éclairant les voies de la connaissance.

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Voyez ces lignes : leur plume n’aurait pas pu les écrire, si elle-même n’avait pas trempé dans l’encre profuse d’une œuvre saisissante d’un des plus grands maîtres du naturalisme français.

 Reconnaissant en Jean Henri Fabre (1823-1915), puisqu’il s’agit de lui et de ses « Souvenirs entomologiques, comme l’un de ses pairs, Charles Darwin -son contemporain, ne pouvait se tromper, lui qui a énoncé en son temps une théorie révolutionnaire de l’évolution des espèces.

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 A l’instar de ses éminentes qualités d’observateur, Jean-Henri Fabre a construit une œuvre majeure qui marquera à tout jamais les sciences naturelles, en leur donnant leurs lettres de noblesse à travers une écriture d’une rare finesse.

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 Qui mieux que lui a raconté et décrit dans le menu détail, à la lumière des connaissances parcellaires de son époque, les mœurs des insectes, ses sujets et compagnons d’exploration microcosmiques ?

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 Plutôt que de faire œuvre de maladroite redondance, nous nous inspirerons de ses lumineuses métaphores, en espérant ni trahir, ni plagier, lui qui  « l'œil toujours en éveil sur la bête et sur la plante s'exerçait tout seul, sans y prendre garde, le futur observateur, marmouset de six ans », lui qui « allait  à la fleur, allait à l'insecte comme la Piéride va au chou et la Vanesse au chardon ».

 

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 S’il est parmi le petit peuple des grandes herbes, un insecte que Jean Henri Fabre affectionnait d’étudier, c’est bien le grillon d’Italie (Oecanthus pellucens) auquel il avait la faiblesse, - comment lui en vouloir ? -  d’accorder toute son attention à la « sérénade » vespérale du petit être aux élytres diaphanes.

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 En effet, au cours des douces soirées d’été, on entend le grillon d’Italie mâle plus qu’on ne le voit. Des heures durant, de la fin de l’après-midi à tard dans la nuit, le leitmotiv d’une seconde environ se répète en d’interminables coups d’archets hypnotiques.

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 Ici ou là, posé à quelque hauteur, parmi la végétation des grandes herbes ou accroché à quelque buisson, il attend son heure, pourvu qu’il fasse chaud et sec. Selon les endroits, et si la météo a été favorable pour le développement larvaire de l’espèce, le tremolo du grillon pellucide (c’est-à-dire dont les ailes sont transparentes) peut envahir l’espace sonore. Sa mélopée n’a rien à envier à son alter ego diurne, le sympathique grillon champêtre. Mais tandis que la prestation d’El Grillo est printanière, l’incantation toute en douceur du pâle grillet a les couleurs chaudes de l’été.

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 On constatera à l’écoute des extraits sonores proposés qu’entre 21h et minuit, le chant du grillon pellucide oscille entre 2000 et 3200hz, ce qui donne une idée de la variabilité fréquentielle selon la température ambiante. Le chant peut être affecté selon divers facteurs temporels et contextuels, notamment liés au comportement entre individus d’une même espèce. Mais nul doute que les variations de température agissent sur la réponse des muscles entrant en jeu dans la production sonore des orthoptères thermophiles.

060921 01 grillon d'Italie et grande sauterelle verte Cantaldenis wagenmann
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sonagramme grillon d'Italie et grande sauterelle verte 060921 Le Puech Cantal.JPG

Sonagramme d'un chant de grillon d'Italie (au centre de l'image), vers 21h, représentant une série de 24 "gri-gri" situés entre 2500 et 3200hz et d'une grande sauterelle verte (en haut) dépassant largement les 10000hz.

 Chez les grillons, ce sont les élytres frottés simultanément l’un contre l’autre, qui en se refermant, produisent la stridulation. Deux accessoires répartis sur l’un et l’autre élytres, à l’arrière du pronotum, forment l’organe complet de friction. Sur le dessous de l’élytre droit se trouve la crète stridulatoire équipée de fines dentelures (appelé râpe ou peigne), tandis que sur le bord interne de l’élytre gauche se situe une nervure calleuse appelée l’archet.

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 Lors de la stridulation, le pronotum se soulève légèrement, libérant ainsi le mouvement synchrone des élytres également appelés tegmina.  Pendant la phase de chant, ceux-ci forment une « voilure de Fée clochette », hissée quasi perpendiculairement au reste du corps et si légère qu’une bourrasque un peu forte pourrait l’emporter.

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 Nous retrouvâmes, un jour, un couple de grillons pellucides noyés dans un lavoir ; le corps du mâle flottait ainsi les ailes dressées.

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 Selon la hauteur et la position où sont levés les élytres, le son produit est plus ou moins fort, plus ou moins voilé ; l’amplification est produite par un résonnateur appelé harpe, situé sur l’une et l’autre élytre. Il est probable que la feuille de quelque végétal sur laquelle est posé le grillon d’Italie lui serve également d’amplificateur.

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 Ainsi, en bon séducteur, notre « ténor napolitain » fait feu de tout bois pour charmer sa muse !

 L’une et l’autre ont l’ouïe fine !  Peu importe l’épaisseur du feuillage, peu importe la distance : les organes auditifs placés sous les genoux des pattes antérieures, guideront l’élue.

 Pourrait-on croire que pour arriver à ses fins l’artiste rende les armes en mettant « le genou à terre » ?

Que Nenni ! l’histoire se poursuit ainsi : maintenus sous l’emprise de leurs cerques respectifs, Dame et son enchanteur mutique, s’adonnent, - pour quelques secondes d'éternité-, aux jeux de l’irrépressible Etreinte.

 

                                                                                                        Denis Wagenmann,  le Puech   01/01/22

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110921 12 grillon d'Italie à minuit Le Puech CantalDenis Wagenmann
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Sonagramme de chant de grillon d'Italie à minuit un peu plus grave (entre 2000 et 2900hz environ) que le précédent

Lexique :

  • Elytres : « fausses ailes » durcies et nervurées, où se situent l’appareil de stridulation chez les grillons.

  • Pronotum : partie corporelle en forme de « cheval de selle » située juste après la tête 

  • Cerques : « 2 petites pinces » présentes chez les deux sexes, mais plus développées chez le mâle, se trouvant à l’extrémité de l’abdomen ; un outillage pratique pour se maintenir l’un à l’autre pendant l’accouplement.

Sources bibliographiques :

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  • Jean Henri Fabre : « Souvenirs entomologiques », une somme en 10 volumes (plusieurs éditeurs) dont sont extraits les extraordinaires « Mœurs des insectes » parus aux éditions Marabout.

  • Eric Sardet, Christian Roesti et Yoan Braud : Cahier d’identification des Orthoptères de France, Belgique, Luxembourg et Suisse + CD Biotopes éditions

      Un ouvrage collectif indispensable pour qui veut se lancer dans l’étude des orthoptères.

  • Heiko Bellmann et Gérard Luquet : Guide des Sauterelles, Grillons et Criquets d’Europe Occidentale ed Delachaux et Niestlé.

  • H.Bellmann, F.Rutschmann, C.Roesti, A.Hochkirch : Sauterelles, grillons et criquets D'Europe occidentale ed Delachaux et Niestlé

  •  Cahier technique : « A la rencontre des Sauterelles, Criquets et Grillons » www.fcpn.org

       Pour une première approche ; contient une clef de détermination simplifiée très utile.

 

  • 100 orthoptères de France Fernand Deroussen, Laure Desutter-Grandcolas, Sylvain Hugel 2cd+livret de 48pages Sonothèque du Museum national d’histoire naturelle.

 L’essentiel des orthoptères réunis en 2CD, également disponible sous forme de clef USB avec livret aux éditions Chiff-Chaff.

Chapitre2

 L’audio-naturaliste, en toute saison, fait œuvre de tout son. Qu’il s’agisse des envolées lyriques des passereaux chanteurs, des suppliques amoureuses des grenouilles et crapauds, du remue-ménage incessant de la taupe, traçant sans faillir son réseau de galeries souterraines, ou des tumultes atmosphériques, -borborygmes d’orage ou bourrasque échevelée-, pour ne donner que quelques exemples « parlant ».

160822 orage, pies bavardes, grillon des bois, mésanges bleues, gobemouche noir Cantal 15h40Denis Wagenmann
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  Aussi, un des aspects de l’activité du preneur de son dans la nature se situe à ras de terre, quand l’été venu jusqu’aux premiers frimas automnaux, celui-ci se penche à l’écoute des criquets et autres sauterelles à la dénomination évocatrice : le mot acridien venant du grec « akris », probablement en raison de la stridulation caractéristique de la petite bête sauteuse.

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 Là « à 4 pattes », ayant perdu de sa superbe dans la vaste prairie, il retrouve alors un peu de l’innocence du temps passé, quand enfant il s’amusait déjà à provoquer leur bond prodigieux, -le plus souvent ailes éployées-, tout en s’ébahissant de leur accoutrement burlesque à la mode cryptique.

180921 tétrix undulata le Puech Cantal.jpg

 Tétrix undulata est une espèce assez répandue, de petite taille, mésophile c'est à dire s’accommodant de milieu plus ou moins humide, et à contrario plus ou moins sec. Se reconnaît à la carène du pronotum nettement saillante ; l’épine pronotale atteignant les genoux postérieurs. Coloration variable mais généralement avec des marbrures foncées.

Selon l’endroit où il vit, l’orthoptère choisit sa pélerine : une garde-robe variée aux multiples variations chromatiques permet, en effet, à bon nombre d’espèces de passer inaperçu. Le plus souvent, seul le déplacement trahit sa présence aux yeux des prédateurs, généralement les oiseaux qui en raffolent.

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 Leur force de propulsion phénoménale, allant de quelques dizaines de centimètres à plusieurs mètres, provient que les « esprits-des-prés » ont 3 paires de pattes, dont les postérieures particulièrement développées, et un appareillage de vol performant formé de deux paires d’ailes.

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Pas étonnant, dans ces conditions supraterrestres, à ce que ces « sportifs chevronnés » s’envoient dans les airs en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, en nous plantant, du reste, littéralement bouche bée !

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 Au repos, la partie visible de chaque paire est le tegmen (tegmina au pluriel), souvent appelé élytre ; relativement plus coriace que l’aile de vol, il protège celle-ci en la recouvrant quasi parfaitement.

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 A l’envol, les tegmina se soulèvent plus ou moins bruyamment selon les espèces. Cela pourrait faire penser au son provenant d’un minuscule éventail que l’on déplierait subitement.  Les deux voiles ainsi déferlées font alors office en quelque sorte d’ailettes, assurant l’improbable équilibre aérien.

Aïolope automnale mâle à l'envol : les deux élytres (ou tegmina) se soulèvent libérant la voilure.

 Quant aux ailes de vol, parfois joliment colorées, comme chez les oedipodes par exemple, se déployant simultanément, elles emportent la bestiole dans une direction inattendue.

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Mais, à l’instar de nos jouets bricolés d’enfant, l’aéronef acridien s’affale tout à coup quelque part entre deux touffes de graminées, ou plus rarement finit sa course en restant suspendu à l’un des fils ourdis d’une constellation d’araignée aux aguets.

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 Les tegmina ont la particularité d’être traversés par une nervure dite radiale, plus épaisse que les autres nervures, qui émet la stridulation quand, s’apprêtant à régler une affaire de coeur, le criquet se met à battre des pattes postérieures. En effet, les fémurs de ces dernières sont équipés, sur leurs côtés internes, d’un « peigne » (plectrum), sorte de râpe dotée de tubercules émoussés, qui vient frotter sur cette nervure.

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 L’aller et retour du battement effectué de haut en bas, produit alors une stridulation d’une durée variable, propre à chaque criquet chanteur, selon un mode opératoire dépendant du tempo, du rythme, de l’intensité du signal mais aussi probablement de la forme de l’organe stridulatoire.

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 Ainsi, quand plusieurs espèces cohabitent, par exemple dans le même pré de fauche, et se mélangent les unes aux autres, chacun de ses membres, mâle ou femelle, se reconnaît et communique grâce à ce chant qui les distingue de leurs voisins.

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Une aubaine pour l’orthoptériste appliqué à les identifier…

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Gardons à l’esprit, qu’un seul mot d’ordre, à deux facettes, gouverne l’intention majeure du mâle : « rivalité et séduction » !

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 Il n’y a qu’à voir avec quel sérieux, l'aède champêtre, trépignant, se dresse, - « fier comme Artaban », sur un brin d’herbe à quelques centimètres du sol, tout à l’écoute du parterre d’orchestre, avant qu’il n’entame son air renversant de bravoure !

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  Chez les Caelifères qui en sont pourvus, les tympans sont idéalement placés, de part et d’autre de l’abdomen, sur le premier tergite abdominal juste au-dessus de l’articulation du fémur postérieur.

Toujours riche d’enseignements, l’observation naturaliste subodore ici qu’il nous faut garder, au cas où, « une oreille sous le coude » !

 

 En ce mois d’octobre 2022, l’été n’en finit pas de durer avec des températures hors normes pour la saison et une sécheresse inquiétante.

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La faible hygrométrie a peut-être retardé de plusieurs semaines l’éclosion des œufs des criquets apparaissant en été, et décalé d’autant les nombreux stades larvaires nécessaires au développement complet de l’orthoptère, c’est-à-dire au moment où l’adulte est en capacité de se reproduire.

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 Ceci dit une deuxième génération a pu avoir lieu, tout simplement, à la faveur de la météo clémente.

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  Toujours est-il que plusieurs espèces de criquets (mélodieux, duettistes, noirs ébènes) auront chanté jusqu’à ce jour du 7 novembre, -certains le font encore pour peu que les températures soient suffisantes-, comme aux plus beaux jours.

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 Les criquets étant des espèces thermophiles, il est nécessaire que la température ambiante soit d’environ une vingtaine de degrés pour qu’ils aient l'énergie suffisante pour chanter. Or, la stridulation dit de cour est, -in fine-, est une invite à l’accouplement. Une fois les œufs inséminés, la femelle pond par le truchement de son oviscapte. Et pour ce qui concerne, notre dernière observation d’une ponte de criquet (mélodieux ou duettiste) date de mi-octobre. Elle eut lieu directement en terre.

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 La plupart des chantres des champs mourront avant la fin de l’année, puisque tel est leur destin ultime ; tandis que, dans les climats doux, certains adultes subsisteront tout l’hiver avant de se reproduire au printemps suivant.

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En attendant, admirons le défilé automnal des quelques insouciants encore en vie et très en verve sonore : « pour l’amour, toujours ! »

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 A tout seigneur, tout honneur, en dépit de sa relative petite taille, environ 15mm pour le mâle, -la femelle étant à ce sujet plus à son avantage-, (omocestus rufipes), alias le criquet « noir ébène » est l’un des acridiens, parmi les plus communs en France - de type euryèce c’est-à-dire s’accommodant de toute sorte de milieux, à végétation rase le plus souvent, pourvu qu'ils soient secs.

 Un vert lumineux à rouge orangé à son extrémité éclaire le dessous de l’abdomen du mâle, mais c’est surtout son aspect globalement sombre, y compris à l’apex des ailes, ainsi que les pattes rougeoyantes qui attirent de prime abord l’œil de l’observateur ravi.

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 D’autres particularités ne manquent pas de susciter l’attention de ce dernier : les deux sexes présentent des genoux postérieurs également très foncés, mais chez la femelle, hormis la taille, c’est la bande dorsale vert très vive, colorant notamment le pronotum, qui la distingue nettement du mâle. L’un et l’autre possédant d’élégantes palpes maxillaires noirs à bout blanc.

Femelle de criquet noir ébène : on reconnaît sans peine l'organe de ponte ou oviscapte, constitué de deux valves génitales placées au bout de l'abdomen.

 Les stridulations du  criquet noir ébène varient en durée, selon qu’il se trouve en concurrence avec un autre mâle, ou si son chant s’adresse plus spécifiquement à la femelle, auquel cas, la phrase chantée sera plus longue jusqu’à une dizaine de secondes.

181022 criquet noir ébène 201 battements sans l'amorce en 11,17 secondes Le Puech CantalDenis Wagenmann
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Sonagramme de criquet noir ébène : 201 battements soit 18 battements environ par seconde

221022 deux mâles de criquets noirs ébènes près d'une femelle, criquets duettistes le Puech CantalDenis Wagenmann
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 Dans l'enregistrement ci-dessus, deux mâles sont côte à côte et à proximité d'une femelle qui ne "bronche pas".  L'un comme l'autre, voulant avoir voix au chapitre, se répondent à tour de rôle... On remarquera que leurs battements sonores sont relativement brefs, avec de plus longues pauses entre chacun d'entre eux. C'est à se demander qui de l'un qui de l'autre va dégainer le premier !

 Des criquets duettistes, en arrière plan, complètent la palette sonore.

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 La séquence suivante met à nouveau en valeur les mêmes mâles ; mais la femelle, lassée des beaux discours des deux prétendants ex aequo, s'envole rapidement. Dépités, ces derniers, un instant, circonspects, feront de même.

 Un criquet duettiste, s'étant approché (à 0'15) entonne un chant d'appel typique de l'espèce. 

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221022 deux mâles criquets noirs ébènes, chant d'appel d'un criquet duettiste le Puech CantalDenis Wagenmann
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221022 criquets noirs ébènes, différentes stridulations longues, brèves, criquets duettistes Le Puech CantalDenis Wagenmann
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 Parmi les nombreux « râpeurs champêtres », égayant cette fin d’automne, on remarque le criquet duettiste (chorthippus brunneus brunneus) dont la particularité artistique est, comme son nom l’indique, de striduler en duo.

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 Ce chant de rivalité « pacifique », c’est-à-dire qui n’occasionne pas de règlement de compte, oppose deux mâles, l’un répondant à l’autre en alternance. Comme chez d’autres espèces animales socialement évoluées, il est fréquent que le mâle propose mais que la femelle dispose en derniers recours…

181022 criquets duettistes chant en duo Le Puech CantalDenis Wagenmann
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 A l’instar de nombreux criquets chanteurs, le criquet duettiste mâle émet plusieurs types de stridulations répondant à plusieurs fonctions. Le plus courant est une stridulation brève, dite chant d’appel qui lui permet de se signaler ; il s’adresse autant aux congénères mâles que femelles.

181022 criquet duettiste chant d'appel Le Puech Cantal Denis Wagenmann
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Le chant est le plus sûr moyen d’identifier le criquet duettiste au milieu des autres, en particulier le chant en duo.

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 Cependant, d’autres critères morphologiques aident à sa détermination. Le mâle se distingue par des antennes relativement longues et surtout par des élytres enfumés, étroits dépassant assez nettement les genoux postérieurs. La taille 14-18 mm et l’allure générale, plutôt svelte, complètent sa reconnaissance.

 En revanche, l’identification à vue de la femelle est sujet à caution ; peu de choses, en effet, distingue celle-ci d’autres femelles criquets, du criquet mélodieux (chorthippus biguttulus biguttulus) par exemple.

 Le mâle de ce dernier, d’une taille similaire à celle du duettiste avec lequel il partage les mêmes biotopes, est reconnaissable au champ costal élargi de ses élytres 

criquet mélodieux mâle, champ sous costal élargi bien visible le Puech Cantal

 Mais surtout,son chant est très caractéristique : l’ensemble de sa stridulation est composé de plusieurs motifs, le plus souvent 3, mais parfois 4 ou seulement 2.

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 L’onde de forme ci-dessous montre une stridulation triple durant 10 secondes : le premier motif est toujours le plus long ; ici, il dure un peu plus de trois secondes, tandis que les deux suivants approchent les deux secondes.

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 Chaque motif, sorte de saccade au profil nerveux, séparé d’une pause de durée variable (une à deux secondes environ) est « joué crescendo c’est-à-dire dont l’intensité va croissant.

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 Généralement, le mâle de criquet mélodieux, ayant fort à faire, se déplace « à pattes » entre chacune de ses stridulations dont la gamme de fréquences est similaire à celle de son alter ego duettiste.  

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Est-ce en raison de ses qualités de marcheur émérite, qu’on le dit ubiquiste, tantôt là, tantôt ici ? Non pas ! On le qualifie ainsi en raison de sa capacité étendue d’adaptation biocénotique.

18102 criquet mélodieux stridulation typique formée de trois motifs Le Puech Cantal Denis Wagenmann
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061022 criquet mélodieux se déplaçant avant de striduler à nouveau, réponse d'un autre le Puech CantalDenis Wagenmann
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 En cette fin d’automne, il nous est impossible de ne pas évoquer un criquet ou plutôt, s'agissant de sa dénomination féminine, une criquette, aux belles mensurations d'ailleurs ( en moyenne 22mm pour le mâle, 28mm pour la femelle).

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 L’aïolope automnale (aïolopus strepens), puisqu'il s'agit d'elle, porte bien son nom tant sa phénologie est tardive mais aussi parce que ses pattes postérieures sont bigarrées.

  En grec, aïolos signifie panaché et podos, pied ! Cette particularité concerne plus précisément les fémurs postérieurs côté interne.

 

Ses élytres sombres portent deux tâches claires qui tranchent avec la couleur générale des ailes.

 

      Malheureusement, ne lui connaissant pas de stridulation, il nous faut nous contenter seulement du fort crépitement produit lorsqu’elle s’envole. D'où le qualificatif de bruyant :  du latin strepens.

 Il faut la suivre, alors, du regard avec attention, non seulement parce qu’elle fait apparaître ses ailes bleuâtres, mais aussi pour ne pas la perdre de vue. En effet, fuyant l’importun, son vol peut l’emporter, dans une direction impromptue, à plus de 7 ou 8 mètres...

Denis Wagenmann , Le Puech le 20 11 2022
 
A suivre...
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